Avec 15 000 repas servis chaque jour dans 89 cantines au sein des écoles publiques nantaises, le temps du repas est central dans la vie scolaire de l’enfant. Il est essentiel à l’apprentissage du goût, à une alimentation équilibrée et à l’initiation aux problématiques environnementales, comme le gaspillage alimentaire. C’est pour répondre à cet enjeu éducatif majeur que des sessions de formation sur le temps du midi sont ouvertes aux animateurs. Elles sont animées par Béatrice Buteau-Sauger, diététicienne à la Ville de Nantes, et Christelle Pluquet, chargée de mission pédagogie et qualité pour la mission périscolaire.
Comprendre le cadre réglementaire
C’est le Programme National Nutrition Santé, établi en 2011, qui définit avec précision comment chaque menu doit être élaboré grâce à un tableau des fréquences : apports en nutriments (calcium, fer, protéines, …), en matière grasse et en calories.
Il est complété par la loi EGAlim promulguée en 2018, qui a pour objectifs de :
- Favoriser une alimentation saine, sûre et durable pour tous ;
- Renforcer le bien-être animal ;
- Réduire l’utilisation du plastique dans le domaine alimentaire ;
- Améliorer les conditions sanitaires et environnementales de production ;
- Permettre aux agriculteurs d’avoir un revenu digne en répartissant mieux la valeur.
Pour la restauration collective, cela implique différentes mesures.
La substitution des plastiques
D’ici à 2025, tous les contenants en plastique doivent disparaître des cantines. C’est déjà le cas à Nantes, où ces contenants individuels à réchauffer sont remplacés par des bacs en inox et les bouteilles plastiques par des carafes. Depuis la rentrée des vacances d’automne 2022, les enfants en élémentaire doivent également amener leur propre serviette de table en tissu : cela évite de jeter 5,8 tonnes de serviettes en papier chaque année.
Les approvisionnements et la qualité des produits
La Ville s’est engagée à augmenter la part du bio et du local dans les cantines. À ce jour, la part des repas est constituée de :
- 43% de produits bio et labellisés
- 15% de produits locaux labellisés
La diversification des sources de protéines et les menus végétariens
La loi impose d’offrir une alternative à la viande au moins une fois par semaine (par la consommation de légumineuses comme les lentilles par exemple). Les restaurants scolaires nantais vont plus loin en proposant depuis la rentrée d’automne 2022 une alternative végétarienne pour tout repas comprenant de la viande.
Pourquoi une alternative végétarienne ?
- Préserver les ressources naturelles : aujourd’hui, d’immenses surfaces agricoles sont consacrées uniquement à la production de céréales pour le bétail, ce qui constitue un manque à gagner pour nourrir la population mondiale ;
- Lutter contre le réchauffement climatique : les élevages sont à l’origine de l’émission de beaucoup de dioxyde de carbone, qui contribuent à l’effet de serre ;
- Découvrir de nouvelles recettes ;
- Mieux équilibrer la consommation de protéines et augmenter la consommation de sucres lents, qui manquent souvent dans l’alimentation de l’enfant.
Pourquoi l’alternative végétarienne ne s’applique-t-elle que lorsqu’il y a de la viande au menu, et pas du poisson ?
Le poisson contenant des Omega 3, essentiels au bon développement de l’enfant, il a été décidé de le conserver une fois par semaine.
L’information aux usagers
La part des produits répondant à la loi EGAlim est affichée dans les complexes scolaires, et est mise à jour régulièrement.
L’élaboration des menus
C’est Béatrice Buteau-Sauger – diététicienne à la Ville – qui élabore les menus avec le chef de production. Il faut pour cela créer un plan alimentaire afin de se renouveler semaine après semaine. De nombreux paramètres sont ensuite à prendre en compte : les délais de commande et de livraison, les services de diététique, d’hygiène, financier…
Le tout mis en œuvre avec l’étroite collaboration du personnel de terrain, qui apporte de précieux conseils par la rédaction de « bons qualité » pour faire remonter les remarques, positives ou négatives, sur le bon déroulement du repas.
La commission restauration
Les services de la Ville, les parents, les enseignants et des enfants participent régulièrement à des temps pour échanger sur la composition des repas.
Éducation au goût et au gaspillage alimentaire : le rôle central de l’animateur

©Benjamin Geminel / Hans Lucas.
La formation « temps du midi » permet également de redéfinir la posture professionnelle de l’animateur.trice lors du repas.
En coordination avec le personnel de cantine, ce sont eux qui sont en lien avec les enfants, sur le terrain. Leur rôle, en plus de l’organisation du déroulement du repas (1er et 2e service s’il y en a, ordre des plats, timing…), consiste entre autres à l’éducation au goût et au gaspillage alimentaire.
L’éducation au goût
L’un des objectifs de l’animateur.trice va être de rendre l’enfant acteur et participatif. Pour ce faire, il doit comprendre son environnement. Il est donc nésessaire d’adopter des postures et des gestes communs, qui seront répétés.
Ainsi, si l’enfant a peur de goûter et refuse de manger, il faut le rassurer :
- En amont, il est conseillé de lui donner le menu et de lui expliquer la composition des recettes ;
- Lors du temps méridien, il faut demander à l’enfant d’essayer ! Plusieurs techniques et formulations peuvent être adoptées : mettre une toute petite quantité dans l’assiette ou inciter l’enfant à toucher les aliments (avec les doigts en maternelle, avec une fourchette en élémentaire). L’animateur.trice peut aussi suggérer à l’enfant de simplement regarder et de poser des questions. Il peux proposer d’en discuter plus tard, ou au contraire de rester et accompagner, selon le besoin qu’exprime l’enfant.
Et si l’enfant refuse catégoriquement de manger, de goûter, de toucher ou de regarder ?
- Dans ce cas-là, il faut s’arrêter et échanger avec lui plus tard. En cas de refus répété, un échange avec les parents sera à envisager.
Le gaspillage alimentaire
Afin de diminuer au maximum le gaspillage alimentaire, l’animateur éduque l’enfant à exprimer ses besoins. Par exemple, a-t-il envie de ce yaourt en entier, ou souhaite-t-il simplement goûter ? Dans ce cas, il peut partager avec d’autres enfants, dans le même pot avec plusieurs cuillères. Le but étant pour lui de comprendre qu’il faut goûter, mais pas jeter.
En ayant connaissance des menus à l’avance, il.elle peut également prévoir le « timing » du repas : tel plat prendra plus de temps à manger, il faudra accompagner les enfants pour manger tel aliment…
Depuis la rentrée 2022, ce sont plus de 70 animateur.trice.s qui ont été formé.e.s sur le temps du midi.
Un nouveau module est actuellement en préparation pour les écoles possédant un self, qui nécessite une organisation et une posture éducative encore différente.