La crise sanitaire a mis en lumière l’existence d’une véritable fracture sociale en France. Elle a montré à quel point le besoin est grand de renforcer les solidarités et en inventer de nouvelles pour répondre aux défis de la précarité et de l’isolement. Face à ce constat, la Ville de Nantes a décidé de lancer 5 mois de débats sur le thème des solidarités. La mission périscolaire y a participé par l’intermédiaire des sites Louise Michel, Chauvinière et Louis Pergaud.
Trois questions pour structurer le débat
La Ville a retenu trois grandes questions pour encadrer ce dialogue citoyen :
- Précarité, isolement, quelle est la situation actuelle ?
- Agir contre l’isolement et la précarité : quelles idées pour demain ?
- Citoyens, associations, entreprises, collectivités… Qui peut agir pour les solidarités ?
C’est sur ce dernier point que la mission périscolaire a pu apporter sa contribution.
Des « débats philo » organisés dans les accueils périscolaires nantais
Les accueils périscolaires des écoles Louise Michel, Chauvinière et Louis Pergaud ont organisé ces débats avec l’aide précieuse d’animateur·rices formés au module « Graine de philo » par la Fédération nationale des Francas. Cette pratique consiste à l’animation d’ateliers de discussion à visée philosophique avec des enfants.
Composés de groupes d’enfants d’élémentaires ou de maternelles, ils ont tenté de répondre à deux grandes questions :
- Qu’est-ce que la solidarité ?
- Et moi, qu’est-ce que je peux faire pour aider les autres ?
À l’accueil périscolaire Chauvinière, ce sont 13 enfants de 8 à 11 ans qui ont participé aux différents échanges. À Louise Michel, ce sont 20 enfants âgés de 7 à 9 ans, et enfin 10 enfants de 4 à 6 ans à l’accueil périscolaire Louis Pergaud. On fait le point sur leurs réflexions, avis et idées.
Paroles d’enfants
Qu’est-ce que la solidarité ?
Plusieurs mots ressortent parmi les enfants :
« C’est aider quelqu’un, défendre quelqu’un » – Perrine, 6 ans
« C’est donner de l’argent pour que les gens puissent s’acheter de la nourriture » – Yannis, 7 ans
« C’est aider les personnes âgées à traverser » – Haroun, 8 ans
« C’est être soudé » – Samuel, 9 ans
Est-ce que la solidarité est naturelle ?
Cette question suscite quelques réflexions parmi les enfants. Beaucoup pensent que oui, mais soulèvent que parfois les gens attendent quelque chose en retour, ce qui fausse la démarche.
Mais la conclusion est sans appel :
« Oui, on peut faire ça par pure gentillesse, sans rien attendre en retour »
Si vous vouliez expliquer à un petit enfant le mot « solidarité », que lui diriez-vous ?
« C’est quand tu aides les autres, quand tu es gentil avec eux, que tu fais des choses avec les autres pour être plus forts ensemble. Par exemple, encourager quelqu’un qui a le trac »
« De ne pas laisser quelqu’un tout seul quand il va mal »
La solidarité peut-elle poser problème ?
Ici, les réponses des enfants sont partagées : cela permet de comprendre davantage l’autre, mais certaines contraintes peuvent apparaître. Manque de temps, peur de ne pas être aidé en retour, empirer une situation sans le vouloir…
« Oui, si tu essaies d’aider quelqu’un mais que tu ne le fais pas correctement. Donc, tu as envie de l’aider mais finalement tu ne l’aides pas vraiment »
Et si la personne n’a pas envie d’être aidée, qu’est-ce qu’on fait ?
« Si quelqu’un est gravement blessé mais ne veut pas être aidé, je vais quand même l’aider. J’appelle quand même les secours »
« Ça dépend de la situation. Par exemple, j’ai envie d’aider quelqu’un qui a du mal à faire un exercice. Je ne vais pas insister parce que si ça se trouve il a envie de trouver la réponse tout seul »
Et moi, qu’est-ce que je peux faire pour aider les autres ?
Dons matériels ou immatériels, solidarité et intégration sont des idées citées spontanément par les enfants. Le sujet de la guerre en Ukraine, et par extension de la solidarité envers les citoyens des pays en guerre, est également très présent.
« Donner des vêtements, de l’argent à la Croix Rouge, héberger les gens qui fuient la guerre »
La question du consentement est également abordée naturellement par les enfants :
« Demander déjà, est-ce que je peux aider ? » – Palden, 5 ans
« Hier, j’ai voulu aider mon frère avec ses lego. Je lui ai demandé « est-ce que je peux t’aider ? Il a dit non, j’ai respecté ce qu’il a dit » – Sabela, 5 ans
Au terme de ces ateliers, la contribution des enfants a été consignée dans le Cahier d’acteurs des Assises des nouvelles solidarités et transmis à la Ville de Nantes.
Et après ?
À l’issue de ces Assises, un rapport final sera rendu public sur la base de l’ensemble des contributions. Il permettra de nourrir :
- un « pacte nantais des nouvelles solidarités » en 2023 mis en œuvre par la Ville de Nantes et les acteurs du territoire ;
- un appel à projet « nouvelles solidarités » pour renforcer et faire émerger de nouveaux projets solidaires en 2023.
Le projet « Graines de philo » est le fruit d’un partenariat entre la Fédération nationale des Francas et la revue belge « Philéas et Autobule, les enfants philosophes ». Il est développé sous l’égide de la chaire Unesco : philosophie avec les enfants.
Ce programme vise à intégrer une démarche à visée philosophique dans l’ensemble des pratiques éducatives, afin de comprendre, d’agir sur le monde et de vivre ensemble de manière intelligente et apaisée.
Exprimer son point de vue, écouter l’autre, argumenter, mesurer la cohérence de son discours, réinterroger son point de vue en le confrontant à d’autres et en ne récitant pas un catalogue d’idées toutes faites… Autant d’idées fortes qui ont pour but de donner toutes les clés à l’enfant pour construire son esprit critique, clés qu’il pourra réutiliser toute sa vie.
Pour en savoir plus
Sur les Assises des solidarités :
https://dialoguecitoyen.metropole.nantes.fr/consultation/solidarite/presentation/presentation
Sur les Francas :
https://www.francaspaysdelaloire.fr/